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Joséphine Baker, Vénus d’ébène engagée

Rédigé par

18.09.2015

Freda Josephine McDonald est née en 1906 à Saint-Louis dans le Missouri d’une mère métisse afro- amérindienne et d’un père aux origines espagnoles. Ses parents avaient monté un numéro de chant et de danse mais un an après la naissance de Joséphine en 1907 son père abandonne sa famille.
Elle grandit avec sa mère son nouveau mari et ses 3 frères et sœurs. En tant qu’ainée elle doit aider à nourrir sa fratrie et passe une partie de son enfance à alterner l’école et les travaux domestiques chez les Blancs, mais aussi à apprendre à danser dans les rues, les cours et les maisons du Saint Louis noir.  A treize ans, Joséphine avait assimilé un immense répertoire de mouvements.
En 1920, Joséphine va tenter sa chance à New York. Elle rejoint la troupe de la comédie musicale Shuffle Along, une comédie musicale composée et interprétée par des noirs. En 1924 elle enchaîna avec le spectacle The Chocolate Dandies dont elle tenait l’un des rôles principaux. La plupart du temps, elle louchait et répétait les bouffoneries qui l’avaient fait connaître.  Lors d’une tournée elle fait la rencontre de Caroline Dudley Reagan, mondaine amoureuse de la musique noire : ragtime, jazz, charleston, qui lui propose de devenir la vedette d’un spectacle qu’elle veut monter en France et qui fera d’elle une star : la Revue nègre.
Un succès fulgurant
La première de la Revue Nègre eut lieu le 2 octobre 1925 devant une salle pleine à craquer avec la présence de Robert Desnos, Picabia, Blaise Cendrars… A 19 ans Joséphine danse sur du charleston – musique alors encore inconnue en Europe – seins nus, simplement vêtue d’une ceinture de bananes. Choqués, certaines personnes se mirent à siffler ou quittèrent la salle et d’autres applaudirent. Le charleston devint la danse phare des Années Folles et la Revue Nègre était devenue l’événement artistique de l’année, contribuant à vulgariser de la mode nègre en France.
Paris est à ses pieds, alors que dans sa patrie règnent racisme et discrimination. Joséphine devient symbole de nouveauté, de liberté et influence nombre de tendances, goûts et aspirations de l’époque et fréquente la haute société parisienne : jazz, dadaïsme, art nègre, cubisme, Colette, Picasso, Man Ray, Domergue, Dunand, Paul Poiret…
Sa coupe de cheveux courte à la garçonne était tellement en vogue, qu’en 1926 elle lance le Bakerfix, pommade plaquante, qui connaîtra un véritable succès.
En 1926, Joséphine rencontre Giuseppe Abatino, dit Pépito de 17 ans son aîné, avec qui elle commence une liaison qui durera 10 ans. Il sera son impresario, son manager, son mentor et contribuera fortement à son ascension. En 1928 elle fait une tournée mondiale : Hongrie, Yougoslavie, Danemark, Roumanie, Tchécoslovaquie, Allemagne, Argentine Autriche Italie Espagne, Suède, Norvège, Hollande, Chili, Uruguay et au Brésil, tout en continuant de susciter la controverse.
En 1930, Henri Varna, directeur de casino de Paris l’engage pour être la vedette de la revue de la saison 1930-1931. Pour souligner l’élégance sauvage de Joséphine, il lui achète un guépard, nommé Chiquita qui devint inséparable d’elle et qui rendait nerveux l’orchestre et frémir le public !
C’est en 1931 qu’elle remporte son grand succès musical avec la chanson J’ai deux amours composée par Vincent Scotto.  Après la mort de Giuseppe et une reconquête décevante des Etats-Unis, Joséphine Baker rentre en France et acquiert la nationalité française en 1937 en épousant Jean Lion. Mais 14 mois après, elle demandait le divorce.
Joséphine la résistante, Joséphine la Gaulliste
Joséphine Baker à joué un rôle important pendant la Seconde Guerre mondiale, en devenant agent du contre-espionnage dès 1939. Utilisant sa notoriété pour récupérer des informations sur les emplacements des troupes allemandes auprès des officiels qu’elle rencontrait dans des soirées, elle mène des misions de renseignements et de transmission d’information. Elle profitait de ses déplacements pour transporter des messages secrets les dissimulant sur ses partitions musicales à l’encre sympathique où à l’intérieur de ses robes.
En juin 1941 Joséphine tombe malade. Suite à une fausse couche elle aurait contracté une grave infection et dû subir une hystérectomie. C’est le plus grand malheur de sa vie.
En 1943, à la demande de Croix Rouge elle chante régulièrement pour les soldats américains noirs français, britanniques et américains postés en Afrique du Nord.
Pour la remercier des services rendus, Joséphine reçut de nombreuses distinctions : la Croix de Lorraine, la médaille de la résistance, la croix de guerre, la Légion d’honneur. On la fit aussi sous-lieutenant des troupes féminines auxiliaires de l’armée de l’air française.
La femme humaniste
Parallèlement à ses spectacles, Joséphine utilise sa popularité dans la lutte contre le racisme, et pour l’émancipation des Noirs, en particulier en soutenant le Mouvement des droits civiques de Martin Luther King, n’hésitant à contredire les règlements des restaurants, des hôtels interdisant leur accès aux gens de couleurs. À cette époque, elle est engagée depuis un moment dans l’action de la LICA qui deviendra la LICRA en 1979. Elle exige dans les négociations de plusieurs contrats une clause de non-discrimination n’acceptant de se produire que si les Noirs étaient admis parmi les spectateurs.
En 1947, Joséphine Baker achète les Milandes en Dordogne, propriété qu’elle  loue depuis 1936, ainsi qu’une bonne partie du village de Castelnaud. Elle veut en faire la capitale de la fraternité et pour cela finance la modernisation des lieux, l’installation de l’électricité et de l’eau courante, des routes, pour améliorer le quotidien des habitants.
Ne pouvant pas avoir d’enfant, en 1954 elle commence à adopter des enfants de couleurs, nationalités et de religions différentes. Elle y accueille 12 enfants qu’elle appelle sa tribu arc-en-ciel.
Joséphine avait connu une enfance difficile à Saint Louis, et était décidée de donner le meilleur à ses enfants. Mais elle engloutit toute sa fortune à  entretenir le domaine et multiplie les concerts pour poursuivre son projet.
Le début de la fin
Les années 60 sont la période la plus troublée dans la vie de Joséphine. Elle est séparée de son mari, écrasée par les dettes, et court les cachets à Paris et en tournée. Surement trop généreuse et très mauvaise gestionnaire, Joséphine ne parvient pas à gérer ses affaires et en 1964, la vente aux enchères du Château est annoncée.
Celle-ci est repoussée de justesse, grâce à Brigitte Bardot qui lança à la télévision un appel de fonds et qui lui envoya un gros chèque. Malgré tout en 1968, une nouvelle fois le château est mis en vente et vendu une misère. Elle monte sur la scène de l’Olympia pour sauver les Milandes, avec l’aide de Bruno Coquatrix et de la firme de disques Pathé Marconi qui édita un 33 tours spécial pour l’occasion.
En 1969 Joséphine est en tournée lorsqu’elle apprend que le nouveau propriétaire a investi les lieux. Elle décide alors de faire le siège du Château mais se fait brutalement expulser. Alors que Joséphine Baker est pratiquement ruinée, sa grande amie la princesse Grace de Monaco, lui offre alors un logement à Roquebrune dans le sud de la France pour le reste de sa vie et l’invite à Monaco pour des spectacles de charité.
En 1975 Joséphine remonte sur la scène du théatre Bobino pour une rétrospective de ses 50 ans de carrière. Deux jours plus tard,  elle est victime d’une hémorragie cérébrale et tombe dans un profond coma.
Elle s’éteint peu à peu à l’hôpital de la Pitié-Salpetrière le 12 avril à l’âge de 69 ans. Elle eu droit durant ces funérailles à l’église de la Madeleine, aux honneurs militaires et fut enterrée au cimetière de Monaco.
 

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